LE TRAIN DE LA VIE

                                                                                                                                             F.F.H.Y., Alénya, séminaire de yoga, mois de mars 2010

 

           La vie est comme un voyage dans un train : on monte, on descend ; il y a des accidents… A certains arrêts, il y a des surprises et à d’autres, il y a une profonde tristesse.

           Quand on naît et qu’on monte dans le train, nous rencontrons des personnes et nous croyons qu’elles resteront avec nous pendant tout le voyage : ce sont nous parents.

         Malheureusement, la vérité est tout autre. Eux, ils descendent dans une gare et ils nous laissent sans leur amour et leur affection, sans leur amitié et leur compagnie.

             En tout cas, il y a d’autres personnes qui montent dans le train et qui seront pour nous très importantes : ce sont nos frères et nos sœurs, nos amis et toutes les personnes merveilleuses que nous aimons.

           Certaines considèrent le voyage comme une petite promenade. D’autres ne trouvent que de la tristesse pendant leur voyage. Il y a d’autres personnes toujours présentes et toujours prêtes à aider ceux qui en ont besoin.

           Certains, quand ils descendent, laissent une nostalgie pour toujours… D’autres montent et descendent tout de suite et nous avons tout juste le temps de les croiser…

           Nous sommes surpris que certains passagers que nous aimons, s’assoient dans un autre wagon et pendant ce temps, nous laissent voyager seuls. Naturellement, personne ne peut nous empêcher de les chercher partout dans le train. Parfois, malheureusement, nous ne pouvons pas nous asseoir à côté d’eux car la place est déjà prise.

           Ce n’est pas grave… le voyage est comme ça : plein de défis, de rêves, d’espoirs, d’adieux… mais sans retour. Essayons de faire le voyage de la meilleure façon possible. Essayons de comprendre nos voisins de voyage et cherchons le meilleur en chacun d’entre eux.

           Rappelons-nous qu’à chaque moment du voyage, un de nos compagnons peut vaciller et peut avoir besoin de notre compréhension. Nous aussi pouvons vaciller et il y aura toujours quelqu’un pour nous comprendre.

           Le grand mystère du voyage est que nous ne savons pas quand nous descendrons du train pour toujours. Nous ne savons pas non plus quand nos compagnons de voyage feront la même chose. Même pas celui qui est assis juste à côté de nous.

           Moi, je pense que je serai triste de quitter le train… j’en suis sûr !

         La séparation avec tous les amis que j’ai rencontrés dans le train sera douloureuse ; laisser mes proches seuls sera très triste. Mais je suis sûr qu’un jour ou l’autre j’arriverai à la gare centrale et je les reverrai tous arriver avec un bagage qu’ils n’avaient pas quand ils sont montés dans le train. En revanche, je serai heureux d’avoir contribué à augmenter et enrichir leur bagage.

             Nous tous mes amis, faisons tout le possible pour faire un bon voyage et essayons de laisser un bon souvenir de nous au moment où nous descendrons du train.

 

           A ceux qui font partie de mon train, je souhaite un bon voyage !

          

 

 

 

 

          


  L'ENFER ET LE PARADIS

 

                                                                                  F.F.H.Y. Alénya, les 24 et 25 avril 2010

                                                        Un vieux moine était assis sur le bord de la route, les yeux fermés, les jambes croisées, les mains posées sur les genoux. Il restait assis là, méditant profondément. Soudain, son zazen fut interrompu par la voix rauque et revendicatrice d’un chevalier.

                                                        « Vieil homme ! Dis-moi à quoi ressemblent le paradis et l’enfer ! »

                                                        Sur le coup, le moine n’eut pas la moindre réaction. Mais peu à peu, il ouvrit les yeux, releva imperceptiblement les commissures de ses lèvres, comme pour sourire, tandis que le chevalier restait planté là, impatient, de plus en plus agité.

                                                        « Tu désires connaître les secrets du paradis et de l’enfer ? demanda finalement le moine. Toi, avec ton allure négligée, avec tes bottes et tes vêtements couverts de boue ; avec tes cheveux ébouriffés, avec ta mauvaise haleine, avec ton épée rouillée et tordue ; toi qui es laid et dont la mère t’habille si drôlement, tu oses me demander de te parler du paradis et de l’enfer ? »

                                                        Le chevalier jura vilainement. Il sortit son épée et la souleva au-dessus de sa tête. Son visage devint cramoisi et les veines de son cou se gonflèrent tandis qu’il s’apprêtait à couper la tête du moine.

                                                        « Cela, c’est l’enfer », lui dit doucement le vieux moine, juste au moment où l’épée commençait à redescendre.

                                                        Le chevalier resta bouche bée de stupéfaction, de respect, de compassion et d’amour devant cet homme aimable qui avait risqué rien moins que sa vie pour lui prodiguer cet enseignement. Il arrêta son épée à mi-chemin et ses yeux se remplirent de larmes de gratitude.

                                                         « Et cela, c’est le paradis ! », conclut le moine…

 

 

 

 

 

 

 

 

L'ESCALIER

 

                                                        F.F.H.Y., Alénya, Séminaire de yoga, mai 2010

                                                        On entend si souvent la question suivante : « Comment peut-on progresser malgré toutes les difficultés quotidiennes ? » C’est comme si on demandait s’il est possible de monter au 2ème étage malgré les marches ! Alors que ce n’est pas malgré mais grâce à l’escalier qu’on peut monter au deuxième.

                                                        Dans la vie, il n’y a pas d’ascenseur ! On monte marche par marche avec ses propres pieds et aucune technologie ne peut nous remplacer. Il n’y a pas de raccourci. On ne saute pas d’étape. On ne peut pas aller plus vite que la musique, que sa musique.

                                                        Vivre, c’est passer consciemment par chaque instant, c’est remplir avec application chaque petit événement qui se présente, avec grand soin, avec respect même, afin que rien ne soit perdu. Tout nous fait progresser dans la mesure où l’on vit pleinement, en l’acceptant. Tout nous sert à progresser. Il n’y a pas de rôle, d’occupations privilégiées.

                                                        La vie des films nous donne l’impression que la vie doit être plus intéressante, que l’on a dû manquer quelque chose quelque part, qu’il doit y avoir quelque chose qu’on n’a pas fait comme il faut et à cause de quoi on mène une vie si plate. A cause de cela, on rêve d’une vie romantique où tout serait agréable, gentil, plaisant.

                                                        Mais c’est moi qui aplatis ma vie ! C’est moi qui ne savoure pas les instants. On ne progresse qu’en remplissant d’une présence attentive ces petits moments sans histoire.

                                                        Lorsqu’on accepte de vivre chacun de ces instants, sans attendre autre chose, on bâtit une plénitude que rien ne peut attaquer. C’est alors que dans notre vie, rien ne se perd, qu’au contraire, tout se crée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

REGLES DE VIE

 

                                                                              F.F.H.Y., Alénya, Séminaire de yoga, juin 2010

 

1)      Un corps t’a été donné.

Tu peux l’aimer ou le détester, mais ce sera le tien pour toute la durée de cette vie.

2)      Tu vas apprendre des leçons.

Tu es inscrit dans une école informelle à plein temps appelée « Vie ». Chaque jour, tu auras l’occasion d’apprendre des leçons dans cette école. Tu pourras aimer les leçons, où penser qu’elles sont idiotes ou sans pertinence.

3)      Il n’y a pas de fautes, seulement des leçons.

La croissance est un processus d’essai et d’erreur par l’expérimentation. Les expériences « ratées » font tout autant part du processus que celles qui réussissent.

4)      Une leçon sera répétée jusqu’à ce qu’elle soit apprise.

Une leçon te sera présentée sous diverses formes, jusqu’à ce que tu l’apprennes. Quand tu l’auras apprise, tu pourras passer à la leçon suivante.

5)      Apprendre des leçons ne finit jamais.

Il n’y a pas de partie de « Vie » qui ne contienne de leçon. Si tu es en vie, il y a des leçons à apprendre.

6)      « Ailleurs » n’est pas meilleur qu’ « ici ».

Quand ton « ailleurs » est devenu « ici », tu obtiens à nouveau un autre « ailleurs » qui à son tour te semblera meilleur qu’ « ici ».

7)      Les autres sont essentiellement des miroirs de toi-même.

Tu ne peux aimer ou détester quelque chose chez autrui que si ce quelque chose reflète une chose que tu aimes ou que tu détestes en toi.

8)      Ce que tu fais de ta « Vie » dépend de toi.

Tu as tous les outils, toutes les ressources dont tu as besoin. Le choix t’appartient.

9)      Tes réponses sont en toi.

Les réponses aux questions de la « Vie » sont en toi. Tout ce qu’il te faut c’est regarder, écouter et faire confiance.

10)  A mesure que tu t’ouvres à cette confiance, tu te souviendras de plus en plus de tout ceci.

 

 

 

 

 

 

 

Le porteur d’eau

 

                                                                                                              Alénya, séminaire de yoga, septembre 2010

                         Un porteur d’eau indien avait deux grandes jarres, suspendues aux deux extrémités d’une pièce de bois qui épousait la forme de ses épaules. L’une des jarres avait un éclat et, alors que l’autre jarre conservait parfaitement toute son eau de source jusqu’à la maison du maître, l’autre jarre perdait presque la moitié de sa précieuse cargaison en cours de route.

                         Cela dura deux ans, pendant lesquels, chaque jour, le porteur d’eau ne livrait qu’une jarre et demie d’eau à chacun de ses voyages. Bien sûr, la jarre parfaite était fière d’elle, puisqu’elle parvenait à remplir sa fonction du début à la fin sans faille. Mais la jarre abîmée avait honte de son imperfection et se sentait déprimée parce qu’elle ne parvenait à accomplir que la moitié de ce dont elle était censée être capable. Au bout de deux ans de ce qu’elle considérait comme un échec permanent, la jarre endommagée s’adressa au porteur d’eau, au moment où celui-ci la remplissait à la source : « Je me sens coupable car je n’ai réussi qu’à porter la moitié de mon eau à notre maître, pendant ces deux ans. »

                           Le porteur d’eau fut touché par cette confession et répondit : « Pendant que nous retournons à la maison du maître, je veux que tu regardes les fleurs magnifiques qu’il y a au bord du chemin. » Au fur et à mesure de leur montée sur le chemin, au long de la colline, la vieille jarre vit de magnifiques fleurs baignées de soleil ; mais à la fin du parcours, elle se sentait toujours aussi mal parce qu’elle avait encore perdu la moitié de son eau.

                          Le porteur d’eau dit à la jarre : «  As-tu vu qu’il n’y avait de belles fleurs que de ton côté et presque aucune du côté de la jarre parfaite ? C’est parce que j’ai toujours su que tu perdais de l’eau, et j’en ai tiré parti. J’ai planté des semences de fleurs de ton côté du chemin et, chaque jour, tu les as arrosées. Pendant ces deux ans, j’ai pu grâce à toi, cueillir de magnifiques fleurs fraîches qui ont décoré la table du maître. »

                           Nous avons tous des éclats, des blessures, des défauts. Nous sommes tous des jarres abîmées. Certains d’entre nous sont diminués par la vieillesse, d’autres ne brillent pas par leur intelligence, d’autres sont trop grands, trop gros ou trop maigres, certains sont chauves, d’autres diminués physiquement… mais ce sont les éclats, les défauts en nous qui rendent nos vies intéressantes et exaltantes.

                           Vous devez prendre les autres tels qu’ils sont, et voir ce qu’il y a de bien et de bon en eux.                        

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                 

Le monde comme miroir

 

                                                                                                                             Alénya, séminaire de yoga, octobre 2010

Dans un lointain pays vivait un vieil homme très sage. Il venait chaque jour s’asseoir sur un vieux banc de pierre, à l’entrée de la ville. Il aimait regarder passer les gens : les marchands qui partaient pour de lointains voyages, les paysans qui venaient vendre leurs produits au marché, les voyageurs qui arrivaient de loin. Il veillait aussi sur ses petits-enfants qui jouaient au pied des murailles.

Ce jour-là, il vit arriver de loin un voyageur, avec un baluchon, qui l’aborda : « Dis-moi, vieil homme, toi qui as toujours vécu ici, comment sont les gens qui vivent dans cette cité ?

--D’où viens-tu ? interrogea le vieillard.

--De la ville qui est derrière la montagne.

--Et comment étaient les gens, là-bas ?

--Ils n’étaient pas très intéressants. Je les ai trouvés froids, mesquins et renfermés.

--Ici, les gens te sembleront aussi froids, mesquins et renfermés », dit notre vieux sage.

Et le voyageur, poursuivant son voyage, disparut dans les ruelles de la ville.Un peu plus tard, un autre voyageur engagea la même conversation avec le vieil homme et finit par lui poser la même question. Lorsque le vieillard lui eut demandé comment ils trouvaient les gens de sa ville d’origine, il répondit avec un large sourire : « Ils étaient généreux, aimables et chaleureux.

--Alors, ici, tu trouveras aussi les gens généreux, aimables et chaleureux. »

Et le voyageur disparut dans les ruelles de la ville. A ce moment, un des enfants qui jouaient à proximité s’approcha de son grand-père et, le tirant par la manche, lui dit : 

« Tu dis des mensonges, grand-père, ce n’est pas bien. Tu m’as appris à ne pas mentir et tu viens de dire à ce voyageur le contraire de ce que tu as dit à l’autre.

--Réfléchis bien, répondit le grand –père. Moi, lors de ces échanges, je n’ai rien dit. Ce sont eux qui ont affirmé que les choses se passaient ainsi. Je n’ai fait que leur servir de miroir et refléter leur propre façon de vivre et de voir ce qui les entourait. Si tu veux, nous pouvons partir à la recherche de nos deux voyageurs et leur demander leurs premières impressions sur les habitants de cette ville. Mais ce n’est pas nécessaire, car je sais déjà ce que chacun d’eux va nous raconter. Et tu peux le deviner toi aussi. »

 

 

 

 

 

 

 

 


Le test des trois passoires

 

Alénya, séminaire de yoga du mois de novembre 2010

 

Socrate avait, dans la Grèce antique, une haute réputation de sagesse. Une de ses connaissances, un jour, vint le trouver :

« Sais-tu ce que je viens d’apprendre sur ton ami ?

--Un instant, répondit Socrate, avant que tu ne me racontes tout cela, j’aimerais te faire passer un test très rapide. Ce que tu as à me dire, l’as-tu fait passer par le test des trois passoires ?

--Les trois passoires ?

--Mais oui, répondit le philosophe. Avant de raconter toutes sortes de choses sur les autres, il est bon de prendre le temps de filtrer ce que l’on aimerait dire. C’est ce que j’appelle le test des trois passoires. La première est celle de la vérité. As-tu vérifié si ce que tu veux me raconter est vrai ?

--Non, pas vraiment. Je n’ai pas vu la chose moi-même, je l’ai seulement entendu dire…

--Très bien ! Tu ne sais donc pas si c’est la vérité. Voyons maintenant. Essayons de filtrer autrement, en utilisant une deuxième passoire, celle de la bonté. Ce que tu veux m’apprendre sur mon ami, est-ce quelque chose de bien ?

--Ah non ! Au contraire ! J’ai entendu dire que ton ami avait très mal agi.

--Donc, continua Socrate, tu veux me raconter de mauvaises choses sur lui et tu n’es pas sûr de leur véracité. Ce n’est pas très prometteur ! Mais tu peux encore passer le test, car il reste une passoire : celle de l’utilité. Est-il utile que tu m’apprennes ce que mon ami aurait fait ?

--Utile ? Non, pas réellement… je ne crois pas que ce soit utile…

--Alors, de conclure Socrate, si ce que tu as à me raconter n’est ni vrai, ni bien, ni utile, pourquoi vouloir me le dire ? Je ne veux rien savoir et, de ton côté, tu ferais mieux d’oublier cela ! »

 

 

 

 

 

 

 

 


 

Les blessures de la vie

                                                                                                             

                                                                                                              Alénya, séminaire de yoga du mois de février 2011

 

Il était une fois un garçon avec un sale caractère. Son père lui donna un sachet de clous et lui dit d’en planter un dans une barrière du jardin chaque fois qu’il perdrait patience de se disputerait avec quelqu’un.

 

Le premier jour, il en planta 37 dans la barrière. Les semaines suivantes, il apprit à se contrôler, et le nombre de clous plantés dans la barrière diminua jour après jour : il avait découvert que c'était plus facile de se contrôler que de planter des clous. Finalement, arriva un jour où le garçon ne planta aucun clou dans la barrière. Alors il alla voir son père et il lui dit que pour ce jour il n'avait planté aucun clou. Son père lui dit alors d'enlever un clou dans la barrière pour chaque jour où il n'aurait pas perdu patience. Les jours passèrent et finalement le garçon pu dire à son père qu'il avait enlevé tous les clous de la barrière.

Le père conduisit son fils devant la barrière et lui dit : "Mon fils, tu t'es bien comporté mais regarde tous les trous qu'il y a dans la barrière…Elle ne sera jamais comme avant. Quand tu te disputes avec quelqu'un et que tu lui dis quelque chose de méchant, tu lui laisses une blessure comme celle -là. Tu peux planter un couteau dans un homme et après le lui retirer, mais il restera toujours une blessure. Peu importe combien de fois tu t'excuseras, la blessure restera. Une blessure verbale fait aussi mal qu'une blessure physique.

Les amis sont des bijoux rares, ils te font sourire et t'encouragent. Ils sont prêts à t'écouter quand tu en as besoin, ils te soutiennent et t'ouvrent leur cœur".

 

 

 

 

 

 

Ombre et Lumière

 

                                                                                                              Alénya, séminaire de yoga du mois de mars 2011

 

Il faisait déjà sombre lorsque Ning, Chang et Kong partirent trouver Shen, leur vieux Maître, dans la montagne.
Ils avaient décidé d'aller le consulter, car ils se faisaient sans cesse entre eux des reproches qui ternissaient leur amitié.

Dans l'agitation du départ, ils partirent sans lanterne et gravirent péniblement le chemin escarpé
et dangereux qui menait chez le Maître.
Ils arrivèrent exténués, les mains et les genoux écorchés. Le vieux Shen les fit entrer.
- Que voulez-vous ?

- Nous sommes venus te trouver, dit Chang, car nous éprouvons les uns envers
les autres des sentiments négatifs qui nous empêchent de vivre en harmonie.
Nous avons besoin de tes lumières.

- Je vous écoute répondit Shen.

- Ning m'énerve, dit Chang. Je le trouve hésitant, passif et soumis.
- C'est possible, dit Shen, mais as-tu pensé que s'il est ainsi, il est peut-être
aussi réfléchi, réceptif et calme ?

- Chang m'agace, dit Kong. Je le trouve autoritaire, agressif et intolérant.
- Cela se peut, dit Shen, mais il est probablement aussi entreprenant, combatif et direct.

- Kong m'irrite, dit Ning. Je le trouve fourbe, manipulateur et hypocrite.
- Alors, dit Shan, il est vraisemblablement aussi habile, convaincant et diplomate.

- Pas d'ombre sans lumière, ni l'inverse, ajouta en souriant le vieux Maître.
Avant de repartir, prenez ma lanterne. C'est plus prudent avec cette obscurité.

Kong, Chang et Ning prirent le sentier du retour sans trébucher ni tomber.
Chemin faisant, ils s'amusaient du jeu des ombres et des lumières projetées par la lanterne de Shen.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jugement

 

                                                                                             

 

Alénya, séminaire de yoga du mois d’avril 2011

 

 

Un homme très pauvre dans un village avait un splendide cheval blanc.
Même les rois l'enviaient et lui en offraient un prix fabuleux.
Mais le vieil homme refusait toujours. Un beau matin l'animal disparut.

Tout le village se rassembla et le traita de vieux fou...
"On t'avais bien dit de le vendre ! Tu serais riche aujourd'hui et maintenant te voila sans cheval ! Quel malheur!"

Le vieil homme répliqua: "Vous allez trop loin.
Le cheval n'est plus dans l'écurie. C'est tout...
Qui vous permet de juger et de dire si c'est une chance ou une malchance ? "Les gens se mirent à rire croyant que le vieil homme était devenu fou.
Il coupait son bois, ne se préoccupait de rien
.

15 jours plus tard, le cheval qui n'avait pas été volé
mais s'était échappé revint avec une douzaine de chevaux sauvages.
De nouveau, les villageois arrivèrent et dirent:
"Tu avais raison vieil homme, nous nous trompions en parlant de malheur.
En réalité c'était une bénédiction. Nous sommes désolés!"
Le vieil homme répondit: "Vous allez encore trop loin!
Le cheval est revenu avec douze compagnons, c'est tout. Ne jugez pas à nouveau! Vous ne connaissez qu'un fait isolé et à moins de ne connaitre toute l'histoire, personne ne peut conclure.

Le vieil homme avait un fils unique. En dressant les chevaux sauvages il se cassa les deux jambes. Les villageois revinrent encore et ne purent s'empêcher de juger."Tu avais raison, ce n'était pas une bénédiction,
mais un nouveau malheur : ton seul soutien de vieillesse! Te voila plus pauvre que jamais!" Le vieil homme dit. "Juger est une manie chez vous! Mon fils s'est cassé les jambes. Qui sait si c'est un bien ou un mal ? C'est ainsi. C’est tout!"

Quelques semaines plus tard le pays entra en guerre.
Tous les jeunes furent mobilisés et envoyés au front sauf le fils du vieil homme. Le village tout entier pleurait et dit au vieil homme. "Tu avais raison. Ton fils a beau être mal en point, il est prés de toi. Nos fils sont partis pour toujours!"Le vieil homme dit :"Il est décidément impossible de parler avec vous, vous n'arrêtez pas de juger!"Dites simplement que vos fils ont été enrôlés de force dans l'armée et non le mien!"Personne ne saura jamais si c'est un malheur ou un bienfait hormis Dieu. Tu ne jugeras pas sinon tu ne pourras jamais faire un avec le tout. Tu resteras obsédé par des fragments, tu tireras des conclusions à partir de faits infimes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

Les Yeux de L'Âme

                                                                                                             

 

 

Alénya, séminaire de yoga du mois de mai 2011

 

Deux hommes, tous les deux gravement malades, occupaient la même chambre d'hôpital. L’un d’eux avait son lit à côté de la seule fenêtre de la chambre.
L'autre homme devait passer ses journées couché sur le dos.
Les deux compagnons d'infortune se parlaient pendant des heures.
Ils parlaient de leurs épouses et familles, décrivaient leur maison, leur travail, leur participation dans le service militaire et les endroits où ils étaient allés en vacances. Et chaque après-midi, quand l'homme dans le lit près de la fenêtre pouvait s'asseoir, il passait le temps à décrire à son compagnon de chambre tout ce qu'il voyait dehors. L'homme dans l'autre lit commença à vivre pour ces périodes d'une heure où son monde était élargi et égayé par toutes les activités et les couleurs du monde extérieur.

De la chambre, la vue donnait sur un parc avec un beau lac. Les canards et les cygnes jouaient sur l'eau tandis que les enfants faisaient voguer leurs bateaux modèles réduits. Les amoureux marchaient bras dessus, bras dessous, parmi des fleurs aux couleurs de l'arc-en-ciel. De grands arbres décoraient le paysage et on pouvait apercevoir au loin la ville se dessiner.
Pendant que l'homme près de la fenêtre décrivait tous ces détails, l’homme de l'autre côté de la chambre fermait les yeux et imaginait la scène pittoresque.

Lors d'un bel après-midi, l'homme près de la fenêtre décrivit une parade
qui passait par là. Bien que l'autre homme n'ait pu entendre l'orchestre,
il pouvait le voir avec les yeux de son imagination, tellement son compagnon le dépeignait de façon vivante. Les jours et les semaines passèrent. Un matin, à l'heure du bain, l'infirmière trouva le corps sans vie de l'homme près de la fenêtre, mort paisiblement pendant son sommeil.

Attristée, elle appela les préposés pour qu'ils viennent prendre le corps. Dès qu'il sentit le moment approprié, l'autre homme demanda s'il pouvait être déplacé à côté de la fenêtre. L'infirmière, heureuse de lui accorder cette petite faveur, s'assura de son confort, puis le laissa seul. Lentement, péniblement, le malade se souleva un peu, en s'appuyant sur un coude pour jeter son premier coup d'œil dehors. Enfin il aurait la joie de voir par lui-même ce que son ami lui avait décrit. Il s'étira pour se tourner lentement vers la fenêtre près du lit. Or tout ce qu'il vit, fut…un mur!

ÉPILOGUE…

Il y a un bonheur extraordinaire à rendre d'autres heureux,
en dépit de nos propres épreuves. La peine partagée réduit de moitié la douleur mais…le bonheur, une fois partagé, s'en trouve doublé.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le gardien du seuil

 

                                                                                                             Alénya, séminaire de yoga du mois de juin 2011

 

Dans un monastère perdu au milieu des montagnes du Japon, un disciple assoiffé d'absolu vient trouver un maître zen.

" Maître très éclairé, apprenez-moi la Délivrance !

-- La Délivrance ? Mon fils, qui donc vous a enchainé ? "

Surpris, le candidat à l'initiation est bien obligé de reconnaître, après quelques minutes de profonde réflexion, qu'à sa connaissance, personne ne l'a enchaîné. Et le maître de lui dire: " Puisque personne ne vous a enchaîné, de quelles chaînes, et de qui voudriez-vous être délivré ? Marchez à votre guise, et prenez garde de ne pas vous forger des chaînes imaginaires, ce sont les plus solides ! "

Le traditionnel " Gardien du seuil " me paraît appartenir à ce domaine de l'Imaginaire, fort réel pour qui veut y croire. Les maîtres et grands initiateurs en tous genres pullulant plus que jamais dans notre époque déboussolée, aiment se référer à ce Seuil qu'il faudrait franchir, pour être un "initié". Ah ! Comme ce serait facile s'il suffisait d'une formule murmurée à l'oreille, dans le secret d'une cérémonie initiatique, pour renverser le Gardien du seuil, en participant désormais à part entière à cette fabuleuse aventure qu'est la Vie universelle, où vie et mort ne sont que les deux inséparables faces d'une même pièce.

On pourrait écrire, et l'on a écrit, des bibliothèques entières sur ce sujet inépuisable, fascinant et toujours terriblement actuel qu'est le Gardien du seuil, depuis les Chérubins gardant avec leur épée de feu le Jardin du paradis, aux dragons des contes de fées et de l'alchimie. Le Dragon est le Gardien du trésor. Celui-ci se trouve enfoui au fond d'une caverne laquelle symbolise des forces à la fois telluriques et psychiques qu'il faut connaître et vaincre. Le trésor caché représente la Vie intérieure, les monstres ou dragons qui gardent ce trésor ne sont en définitive que les images de nos désirs et de nos passions qui nous empêchent d'y accéder...

Le Dragon demeure latent en chaque être, comme endormi et toujours prêt à se réveiller si l'on manque de vigilance. Auquel cas le Dragon renaît et ses forces détruisent et dévorent celui qui les affronte sans être suffisamment préparé, car c'est là son rôle de Gardien des secrets du divin.